Planter une haie le long des chemins et des champs

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 haie bocage


Planter une haie le long des chemins et des champs


Temps de lecture : 6 minutes
Dire que les populations d’insectes, d’oiseaux et de petits mammifères s’effondrent est devenu un lieu commun depuis quelques années. Les rapports et statistiques s’accumulent et énoncent des chiffres tous plus alarmants que les autres.Il existe une solution simple et esthétique pour lutter localement contre la disparition de la faune, et ce sans évoquer la lutte contre les pesticides qui fera l’objet d’un article ultérieur, et ainsi restaurer une continuité écologique terrestre : planter une haie.

Les avantages méconnus des haies

La destruction des haies représenteraient 70% des haies existantes en France dans les années 50. Ce chiffre équivaut à 1.4 million de kilomètres, essentiellement pour supprimer les bocages et instaurer des grandes parcelles agricoles unifiées idéales pour la monoculture. Ce phénomène est responsable de l’érosion que subissent les sols agricoles exploités intensivement, ainsi que de la disparition de la faune, qui n’a plus d’habitat pour subsister dans ces plaines.
Mais il ne faut pas pour autant se décider à replanter n’importe quelles haies non plus. La France ne s’est pas encore remise du fléau des haies de résineux, types thuyas, qui acidifient les sols et empoisonnent les animaux, et qui cassent les corridors écologiques dans les lotissements où ils sont massivement répandus. Cette haie doit être feuillue, c’est à dire vivante, évolutive et donc soumise aux cycles saisonniers.
Pour énoncer les qualités de la haie, je vais reprendre les avantages que mes amis du blog défi-écologique ont déjà rassemblés
  • Elle sert de brise-vent.
  • Elle vous fournira, si vous optez pour des fruitiers, toute une gamme de fruits, qui contribueront à la résilience alimentaire du territoire.
  • La haie champêtre abritera nombre d’insectes en fonction de ses différentes périodes de fleurissement, mais aussi en fonction des abris qu’elle pourra leur fournir sans compter ceux qui se nourrissent de bois mort (dits « saproxyliques »).
  • Elle permettra aussi à l’avifaune de s’y réfugier, de nicher et de s’y nourrir, celle-ci se révélant alors un précieux allié pour débarrasser vos cultures de tous les parasites, ce qui facilite la conversion vers une agriculture biologique.
  • Comme pour les oiseaux et les insectes, tout le cortège de la petite faune saura tirer parti d’un tel milieu (pensez à laisser des ouvertures dans vos grillages pour laisser passer les hérissons !).
  • La haie champêtre fleurit. Elle fleurit au printemps oui, mais peut fleurir en été tout comme en automne aussi. Si on rajoute à cela taille et forme des feuilles autant que tout le panel de tons incroyables entre variétés et saisons, et vous avez rapidement un tableau qui évolue tout au long de l’année.
  • Elle consommera les nitrates, dont les arbres et arbustes ont besoin pour croître, et dépolluera ou limitera la pollution des sols.
  • Un sol protégé du lessivage par une haie champêtre et, de fait donc, riche en humus aussi, abritera une foule de micro-organismes décomposeurs améliorant la qualité du sol et rendant de nombreux services écosystémiques (notamment celui de décomposer tout ou partie des produits chimiques tels que les pesticides et herbicides).
  • Elle produira de l’humus, à partir de ses feuilles et autres déchets tombés au sol, ce qui l’enrichira.
  • Vous pourrez ainsi également broyer les résidus de taille et les utiliser comme bois raméal fragmenté, simple paillage pour votre potager et vos bordures de fleurs ou pour alimenter votre compost.
  • Dans les régions à fortes chaleurs elle peut être réfléchie de manière à produire l’ombre telle qu’on la souhaite en fonction de son orientation et de sa hauteur.
  • Parce que planter une haie avec vos enfants est un excellent moyen de les amener à prendre conscience du rythme auquel fonctionne la nature et plus particulièrement la lenteur (relative) à laquelle se développent les plantes arbustives.
  • La haie champêtre participera du drainage des eaux de pluie qui s’infiltrent alors plus facilement dans le sol en suivant son système racinaire, limitant du même coup l’érosion des sols.
  • Parce qu’il est aussi possible de penser sa haie dans le cadre des problématiques locales de protection des espèces (oiseaux, insectes, etc. en danger), la haie peut permettre à tout un chacun de participer à la conservation d’espèces dont les effectifs sont faibles
Dans le cadre de la stratégie de résilience alimentaire que nous développerons dans les articles de la catégorie alimentation, l’implantation de haies se révélera très vite un allié précieux pour les parcelles maraichères que la ville sera amenée à créer, tant par leur pouvoir protecteur que par leurs capacité de régénération et d’entretien des sols près desquels elles sont placées.


La méthode clé pour implanter des haies sur son territoire

Et pour les planter, les maires disposent d’un gros avantage : le PLU.
En effet, en instaurant un emplacement réservé dans ce document de planification urbaine, de manière à définir des parties du territoire servant l’intérêt général, notamment via la création d’espaces verts, la mairie y empêchera toute construction non compatible avec le projet prévu. Ensuite pour l’acquérir, 3 possibilités s’offrent à la collectivité
  • Préempter le terrain lors de sa mise en vente par le propriétaire
  • Attendre que le propriétaire se décide à user de son droit de délaissement pour l’acquérir à moindre coût
  • Proposer un rachat du terrain à l’amiable
C’est la méthode choisie par la commune de Laubach (320 habitants), dans le Bas-Rhin qui, malgré ses faibles moyens, a fait de la réimplantation de haies sa priorité en les consacrant dans son PLU, ce qui leur a permis d’acquérir suffisamment d’espace pour planter 500m linéaires de haies champêtres le long des chemins de la commune. Et, poursuivant cette optique, des haies et arbres ont également été plantés dans la cour de l’école élémentaire dans le cadre d’une démarche de pédagogie active inspirée par la méthode Montessori.
Financièrement, cette opération ne revient pas très chère. Pour 500m de longueur, en se donnant une bande de deux mètres de large, on peut estimer le coût de l’acquisition foncière, tous frais inclus, à 10 000 € environ. Avec l’achat des arbustes et du matériel qui va avec, au total, on peut doubler ce montant. Soit 20 000 € pour reverdir les routes et les champs.
En Alsace, c’est l’association Haies Vives d’Alsace qui est la référence pour accompagner les projets, conseiller sur les espèces et créer des animations sur mesure.

Autres méthodes de planification

Pour autant, il est possible que vous ne puissiez pas recourir à cette méthode, soit parce que vous venez d’adopter votre PLU et ne voulez pas replonger dedans, soit parce que vous dépendez d’un PLUI et l’interco ne souhaite pas mettre en oeuvre cet outil. Il vous reste deux solutions
  • Une expropriation classique des propriétaires concernés, ce qui est plus contraignant que l’emplacement réservé, mais devrait bien passer auprès de la préfecture, puisque votre projet concerne la création d’espaces verts sur un emplacement proportionné à l’objectif visé.
  • L’accord à l’amiable avec le propriétaire, où les agriculteurs les plus réticents à ce genre d’initiatives seront évidemment opposés à votre projet.



Pérennisation des haies

Par ailleurs, pour durer dans le temps, vos haies doivent être acceptées par tous les acteurs concernés. Les habitants se baladeront avec plaisir le long des chemins pour y cueillir des baies et autres petits fruits typiques. Tandis que les naturalistes se satisferont du retour de la biodiversité dans la commune. La communication municipale saura valoriser ces nombreux bénéfices.
Mais votre principal adversaire, vous le savez déjà, sera les agriculteurs, qui n’aiment pas les haies sur les champs et les chemins, puisque ces dispositifs gênent les champs en monoculture et le passage de leurs engins. D’ailleurs, jusqu’à 2015, la Politique Agricole Commune ne les comptait pas dans les surfaces exploitées. Ainsi, pour maximiser leurs revenus, les agriculteurs coupaient les haies.
Je vous propose donc de contractualiser avec les exploitants limitrophes l’entretien des haies, des talus et des bords de route. Ainsi, ils les tailleront dans le respect de ses petits habitants. L’association Alsace Nature décrit bien dans cette brochure les principes à respecter pour l’entretien durable des zones herbeuses et des haies.

Alternatives

Planter une haie vivante n’est pas votre seule solution. Vous pouvez également opter pour deux autres solutions susceptibles de favoriser la biodiversité sur votre territoire, le long des chemins, des rivières ou des champs.
  • le plessage, c’est à dire la constitution d’une haie tressée avec de l’osier ou d’autres essences, qui s’entremêleront naturellement au fil des années, constituant une haie vivante capable de maintenir des talus ou des berges, mais aussi d’abriter et nourrir la biodiversité, comme évoqué plus haut.
  • La création de haies mortes (ou sèches), c’est à dire un tas de bois mort et de branches, éventuellement maintenus par des piquets. Ce tas, entassé avec soin, pourra agrémenter les parcs et friches sans demander beaucoup d’effort, tout en offrant les mêmes avantages qu’une haie vivante. Ce site offre un bon récapitulatif des techniques en jeu.
Planter une haie offre ainsi une palette d’avantages pour la transition écologique de votre territoire, puisque outre leur rôle dans la préservation de la biodiversité, elles contribuent à la résilience alimentaire, à l’éducation, voire à l’animation des habitants dans la vie de votre commune. Un mur végétal qui créé des ponts vers un avenir radieux en somme.