L'agence internationale de l'énergie appelle à exploiter le potentiel du biogaz biomethane

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Production de biogaz





Installation de production de biogaz à Jordberga en Suède. (©Gasum Ltd)
Le potentiel du biogaz et du biométhane est « énorme et largement inexploité », souligne l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans un nouveau rapport publié le 19 mars(1). Ce qu’il faut en retenir.
Une production très faible par rapport au potentiel estimé par l’AIE
Pour rappel, le biogaz est issu de la méthanisation de matières organiques fermentescibles (résidus agricoles, effluents d’élevage, déchets urbains, etc.). Constitué principalement de méthane (CH4) comme le gaz naturel ainsi que de dioxyde de carbone (CO2), il est très majoritairement utilisé à des fins de production de chaleur et d'électricité.
L'AIE rappelle que le biogaz peut être « purifié »(2) pour être injecté sur les réseaux gaziers : il est alors transformé en biométhane, parfois aussi qualifié de « gaz naturel renouvelable » (celui-ci ayant les mêmes propriétés que le gaz naturel). L’Agence évoque dans son rapport une deuxième grande voie de production du biométhane : la gazéification de biomasse associée au procédé de méthanation.
Selon l’AIE, le développement du biogaz et du biométhane devrait contribuer à répondre à « deux défis critiques de la vie moderne », à savoir la gestion d’un volume croissant de déchets organiques et la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
En 2018, la production mondiale de biogaz et de biométhane s’est toutefois limitée à près de 35 Mtep (dont 3,5 Mtep pour le biométhane), soit seulement une petite « fraction du potentiel estimé » par l’AIE (570 Mtep par an pour le biogaz et 730 Mtep par an en incluant le biométhane). Cette production est aujourd’hui principalement concentrée en Europe (très majoritairement en Allemagne(3)). Elle valorise essentiellement des résidus agricoles et du fumier(4).
Selon l’AIE, biogaz et biométhane pourraient d’ores et déjà permettre de couvrir environ 20% de la demande mondiale de gaz si les ressources « durables » actuellement disponibles (l’AIE exclut celles entrant en concurrence avec l’alimentation pour les terres agricoles) étaient pleinement consacrées à leur production.
Production théorique de biogaz et de biométhane dans le monde en 2018
Un appel à reconnaître le rôle des gaz « bas carbone » dans les transitions énergétiques
L’AIE considère que le biogaz et le biométhane pourraient « jouer un rôle majeur dans un futur énergétique durable ». D’ici à 2040, le volume des ressources mobilisables pour la production de biogaz et de biométhane pourrait croître de 40% au niveau mondial selon l’AIE. L’Agence signale en particulier les « opportunités à travers la région Asie-Pacifique », où la consommation et les importations de gaz naturel ont fortement augmenté ces dernières années(5).
L’AIE souligne que le biogaz pourrait, dans les pays en voie de développement, fortement réduire la dépendance à la biomasse solide traditionnelle pour la cuisson, en améliorant la santé de la population et le développement économique de ces zones. Dans son scénario Sustainable Development (scénario jugé compatible avec les objectifs de lutte contre le changement climatique), l’AIE estime que le biogaz pourrait en particulier fournir « une source de cuisson propre à 200 millions de personnes en plus dans le monde d’ici à 2040, dont la moitié en Afrique ».
Toujours selon ce scénario, le développement du biométhane pourrait permettre d’« éviter l’émission d’environ 1 000 millions de tonnes (Mt) de gaz à effet de serre en 2040 » (estimation en considérant « les quantités de CO2 qui auraient été émises si le gaz naturel avait été utilisé à la place du biométhane, ainsi que les émissions de méthane résultant de la décomposition de matières premières qui seraient évitées »).
Pour exploiter pleinement le potentiel du biogaz et du biométhane, l’AIE appelle les gouvernements à reconnaître les bénéfices associés à ces gaz « bas carbone » dans le cadre de leurs transitions énergétiques : « la part de l'électricité qui avoisine 20% de la consommation finale d’énergie dans le monde augmente » mais ce vecteur ne peut pas « à lui seul entraîner ces transitions énergétiques ». À cette fin, un soutien public plus fort en faveur de la production de biogaz et de biométhane est jugé nécessaire (via de nouvelles politiques de gestion des déchets, la prise en compte des externalités positives du biogaz, l’introduction de quotas d’énergie renouvelable dans les transports, etc.)(6).
  1. Outlook for biogas and Prospects for organic growth, AIE, mars 2020.
  2. En retirant le CO2 et des impuretés.
  3. D’autres pays « comme le Danemark, la France, l’Italie et les Pays-Bas ont activement fait la promotion de la production de biogaz », précise l’AIE.
  4. Près de deux tiers de la production mondiale de biogaz en 2018 était utilisée pour produire de l’électricité et de la chaleur (cette production étant approximativement répartie à parts égales entre les centrales électriques et centrales de cogénération). Près de 30% du biogaz était par ailleurs consommé dans les bâtiments.
  5. L’AIE fait par ailleurs état de « possibilités significatives en Amérique du Nord et du Sud, en Europe et en Afrique ».
  6. La compétitivité du biogaz et du biométhane vis-à-vis des combustibles fossiles pourrait entre autres résulter des mécanismes de tarification carbone. Le coût de production de biométhane, qui dépend entre autres des intrants, est aujourd’hui généralement bien plus élevé que celui du gaz naturel (le prix moyen de production du biométhane est d’environ 19 $/ MBtu selon l’AIE, « avec des coûts additionnels pour le raccordement au réseau gazier ») mais l’AIE estime que près de 30 Mtep (« l’équivalent de 40 milliards de m3 ») pourraient annuellement être produits dès à présent « à un prix inférieur au prix domestique du gaz naturel ».